Février étant le mois de la sobriété, nous parlerons dans ce blogue de l’alcool des raisons pour lesquelles les gens en boivent ou n’en boivent pas, et des effets de l’alcool sur le métabolisme, les organes et le cerveau.
Èvelyne Bourdua-roy est certifiée en médecine de l’obésité et elle voit des patients en clinique pour discuter de surpoids et d’obésité depuis 2019. Si tous les problèmes de poids qu’elle a vus jusqu’à maintenant ont toujours été multifactoriels, les causes principales varient d’un individu à l’autre. Un jour, une dame début quarantaine est venue la consulter pour perdre du poids. Elles ont fait le tour des piliers de la perte de poids, incluant le sommeil et la gestion du stress, et ont convenu d’essayer une approche basée sur la réduction thérapeutique des glucides et le jeûne intermittent.
Son bilan sanguin révélait en effet des glycémies anormalement élevées mais pas encore dans la zone de diagnostic de diabète de type 2, des triglycérides élevés dans son bilan de cholestérol, avec le bon cholestérol bien trop bas, et des enzymes du foie plutôt élevés. Tout, dans son bilan, était compatible avec une forte résistance à l’insuline et dysfonction métabolique. Une personne dans ce contexte est à risque de développer le diabète de type 2 dans les prochaines années si ses habitudes de vie ne changent pas. En santé métabolique, on s’intéresse à la prévention et donc à attraper la maladie des années avant qu’elle ne se manifeste officiellement.
Dre Bourdua-Roy a donc suivi cette patiente pendant plusieurs mois. Chaque fois que la patiente revenait en suivi, elle avait perdu très peu de poids ou pas du tout, et elle disait qu’elle ne comprenait pas pourquoi ça ne marchait pas. Elle était découragée, tout comme la docteure, qui ne comprenait pas plus pourquoi ça ne marchait pas car elle avait l’air de bien faire les choses. Toutefois, il faut se rappeler qu’il n’y a aucun traitement, aucune approche, même aucun médicament ou chirurgie qui fonctionne pour tout le monde. Alors, peut-être faisait-elle partie des exceptions.
Finalement, la patiente a cessé d’aller à ses suivis pendant plusieurs mois.
La patiente est revenue consulter presqu’un an plus tard. Elle avait alors pris beaucoup de poids. Elle a alors avoué, en pleurant, qu’elle avait une dépendance à l’alcool et qu’elle en avait tellement honte qu’elle n’en avait jamais parlé. En réalité, tout le long qu’elle consultait pour la perte de poids, elle consommait une à deux bouteilles de vin chaque soir, tous les soirs…
Effectivement que l’alcool est un immense saboteur de perte de poids, mais il a également d’importants impacts d’un point de vue métabolique, sur les organes et dans le cerveau. Notre objectif n’est pas de vous dire de ne plus en boire si vous en buvez, mais plutôt que vous ayez plus de connaissances sur le sujet et que vous preniez des décisions éclairées.
Les raisons pour lesquelles les gens pourraient choisir de ne pas consommer d’alcool :
Toutes ces raisons sont valides, si vous décidez de ne pas boire lors d’un événement social. Vous n’avez pas à vous justifier, vous pouvez simplement dire à votre entourage « Non merci, ce soir je ne bois pas » et vous rappeler que vous ne refusez pas l’amour de vos proches, vous refusez de consommer quelque chose que vous préférez éviter pour des raisons qui vous appartiennent.
- Personnalité dépendante
- Expérience ou antécédent d’alcoolisme
- Personne proche qui a une dépendance à l’alcool
- Santé du foie, surtout si stéatose ou même début de cirrhose
- Prise de certains médicaments incompatibles avec l’alcool, comme certains antibiotiques
- Perturbateur de perte de poids
- Perturbateur de lobe frontal (volonté, comme dans volonté de ne pas engloutir tout le bol de chips)
- Perturbateurs des facultés cognitives : pas capable de conduire, pas capable de surveiller un jeune enfant ou une personne âgée fragile, etc.
- Difficultés physiques et psychologiques après coup : mal de tête, fatigue, brouillard mental, envie de manger et envie de ne pas bouger, irritabilité, etc.
- Coûts
- le goût : certaines personnes détestent le goût de l’alcool et ne voient simplement pas d’intérêt d’apprendre à l’aimer
- etc.
Toutes ces raisons sont valides, si vous décidez de ne pas boire lors d’un événement social. Vous n’avez pas à vous justifier, vous pouvez simplement dire à votre entourage « Non merci, ce soir je ne bois pas » et vous rappeler que vous ne refusez pas l’amour de vos proches, vous refusez de consommer quelque chose que vous préférez éviter pour des raisons qui vous appartiennent.
Rappelons que l’alcool est une drogue, une toxine. C’est la raison pour laquelle nos fonctions sont altérées quand nous en consommons. C’est aussi la priorité oxydative numéro 1 du foie, c’est-à-dire que lorsque l’on boit de l'alcool et que l’on mange, le foie va s’en occuper en tout tout premier, avant tout le reste, en raison de la toxicité que représente l’alcool pour le corps.
Les impacts de la consommation d’alcool sur le métabolisme :
- Bloque la gluconéogenèse → cela peut donc entraîner une hypoglycémie, qui, si c’est le jour, va donner faim, et si c’est la nuit va entraîner un réveil ou un mauvais sommeil, comme des cauchemars ou des sueurs nocturnes.
- Bloque la glycogénolyse → réserve d’urgence de sucre (glycogène) surtout dans le foie, donc comme mêmes effets que le blocage de la gluconéogenèse.
- Bloque l’oxydation des acides gras → ceux que l’on vient de manger seront stockés et nos propres réserves de graisse déjà présentes dans le corps seront inaccessibles.
- Favorise la lipogenèse → le corps gère l’alcool et dépense les calories de l’alcool, alors il n’a pas besoin du reste et décide souvent de stocker le reste, sous forme de graisse.
- Bloque la cétogenèse → pour les personnes qui veulent être et rester en cétose nutritionnelle (avoir des corps cétoniques en circulation et être capable de les utiliser comme carburant), pour des raisons thérapeutiques ou parce que c’est ainsi qu’elles se sentent le mieux, il est pertinent de savoir que la production de corps cétoniques par le foie peut arrêter, si le foie est en train de gérer l’alcool.
Les impacts de l’alcool sur les organes et le cerveau :
- L'impact le plus notable de la consommation excessive d'alcool est sur le foie. L'alcool est métabolisé dans le foie, et une consommation excessive peut entraîner des maladies du foie telles que la stéatose hépatique (foie gras), l'hépatite alcoolique, la cirrhose et éventuellement le cancer du foie.
- Une consommation excessive d'alcool peut augmenter la pression artérielle, entraîner des troubles du rythme cardiaque et contribuer au développement de maladies cardiovasculaires.
- L'alcool a des effets dépressifs sur le système nerveux central. Une consommation excessive peut entraîner des troubles cognitifs, des problèmes de mémoire, des changements d'humeur et, à long terme, un risque accru de démence.
- L'alcool peut provoquer une inflammation du pancréas (pancréatite), une condition douloureuse et potentiellement grave.
- L'alcool peut irriter la muqueuse de l'estomac, entraînant des problèmes tels que l'inflammation de la muqueuse gastrique (gastrite) et des ulcères.
- Outre les effets sur l'estomac, la consommation d'alcool peut également affecter d'autres parties du système gastro-intestinal, entraînant des problèmes tels que le syndrome de l'intestin irritable (SII). N’oublions pas que l’intestin est tapissé d’une mince couche de cellules appelées entérocytes, d’une épaisseur d’une seule cellule, et que cette mince couche est très sensible à l’alcool. Lorsque certains entérocytes sont endommagés ou que les jonctions (ou attaches) qui les relient entre elles se brisent, il y a un passage qui se fait vers l’intérieur du corps, en passant par le système immunitaire et la circulation sanguine.
- Une consommation excessive d'alcool affaiblit le système immunitaire, rendant l'organisme plus vulnérable aux infections.
- L'alcool peut entraîner une déshydratation et affecter la fonction rénale. De plus, certaines maladies rénales peuvent être exacerbées par une consommation excessive d’alcool.
- Chez les hommes, une consommation excessive d'alcool peut entraîner une diminution de la production de spermatozoïdes et des problèmes d'érection. Chez les femmes, cela peut perturber le cycle menstruel et augmenter le risque de complications pendant la grossesse.
La consommation excessive d'alcool est associée à diverses maladies et problèmes de santé, notamment :
La cirrhose, la stéatose hépatique (foie gras) et l'hépatite alcoolique, plusieurs types de cancer, notamment le cancer du foie, du sein, de la gorge, de l'œsophage et du côlon, de l'hypertension artérielle, les maladies cardiovasculaires, neuropathie périphérique, la démence et des troubles de la coordination, la dépression, l'anxiété et le risque accru de suicide, gastrite, ulcères et le syndrome de l'intestin irritable, le diabète de type 2 et troubles hormonaux, chez les hommes, l'alcoolisme peut entraîner une diminution de la production de spermatozoïdes et des problèmes d'érection. Chez les femmes, il peut perturber le cycle menstruel et augmenter le risque de complications pendant la grossesse, problèmes rénaux comme la néphropathie alcoolique, les infections, etc.
Du point de. vue du poids
- L’alcool finit par faire trop baisser le taux de sucre dans le sang, ce qui donne faim et incitera à manger. Cela peut même entraîner une hypoglycémie réactionnelle.
- L'alcool contient des calories (vides) ainsi que du sucre, surtout s’il est consommé en cocktail. Le sucre stimule la sécrétion d’insuline, qui est l’hormone maîtresse du stockage des graisses.
- Si c’est la nuit, vous allez probablement vous réveiller, en raison de cette hypoglycémie, et peut-être que vous aurez de la difficulté à vous rendormir. Et peut-être aussi que votre sommeil sera perturbé, peuplé de rêves agités, etc. Très certainement, l’architecture de votre sommeil sera affectée et vous aurez moins de sommeil profond.
- Quand le foie est occupé à gérer l’alcool, de façon prioritaire, il tend à vouloir stocker ce que l’on mange dans nos adipocytes, plutôt que d’être en mode brûlage de graisse.
- L'alcool déshydrate l'organisme et ce dernier a alors tendance à faire de la rétention d'eau pour compenser, en plus d’envoyer au cerveau des signaux qui peuvent être interprétés comme de la faim. On sait que le cerveau confond souvent la soif et la faim.
- L’alcool embrouille les signaux de satiété et ouvre l’appétit. On a d’ailleurs très souvent le réflexe d’accompagner ses consommations alcoolisées d’aliments à grignoter, comme des craquelins, des chips, des arachides, et à manger de plus grandes portions aux repas. En fait, il est très difficile d'arrêter de manger lorsque l'on a commencé à boire.
- L’alcool diminue aussi la capacité du lobe frontal à prendre de bonnes décisions, en lien avec ses objectifs personnels. Une certaine désinhibition s’installe. Une partie de votre cerveau vous dit « hey, ne mange pas tout cela pour accompagner ton petit drink, ce n’est pas bon pour toi », mais cette voix est faible et lointaine. Une voix plus forte et joyeusement tonitruante répond « Ah là là, on s’en fiche! On a envie de manger cela et on va le manger! ».
- Le lendemain d’une soirée arrosée, on se sent plus fatigué, ralenti, alourdi, avec peu de désir de bouger et de manger santé.
La dépendance
Si vous pensez que vous avez un problème de consommation d’alcool, ne restez pas seul avec ce poids sur vos épaules. Le propre des dépendances est de mener à l’isolation. Consultez un professionnel de la santé. Allez à une réunion des Alcooliques anonymes (AA) en personne. Il y en a dans toutes les villes, plusieurs soirs par semaine. Si vous habitez vraiment loin ou n’avez pas de moyen de transport, il y a des rencontres en ligne aussi, ainsi qu’un numéro de téléphone.
Sachez qu’il existe aussi des médicaments qui peuvent être prescrits pour aider avec les dépendances, toutes les dépendances, pas juste l’alcool, et incluant la dépendance au sucre, et donc qu’une consultation avec votre médecin de famille pourrait vous aider. Finalement, il y a des endroits où on peut aller faire une cure de désintox alcoolique. Le sevrage d’une dépendance à l’alcool doit absolument se faire sous supervision médicale car elle peut comporter de graves risques pour la santé. Ne jamais faire un sevrage d’alcool tout seul chez soi!
Le contraire de la dépendance, ce n’est pas l’abstinence. C’est la connexion humaine. Cherchez de l’aide, parlez, allez vers les autres. Ne restez pas dans l’isolation, la honte et le désespoir.
Si vous êtes sobre mais avez déjà eu des problèmes d’alcool, rappelez-vous que tous ne comprennent pas la dépendance et certains peuvent penser que c’est simplement une question de volonté et, de ce fait, que si vous prenez un seul petit verre de temps en temps ou pour une occasion spéciale, c’est bien correct. N’ayez pas peur d’être ferme mais courtois et répondez « Merci de penser à moi, j’apprécie ton offre, mais je ne bois pas et je ne veux pas boire. Merci de ne pas insister et de m’aider à garder ma sobriété » .
C’est comme pour toutes les dépendances : 1 verre ou 1 bouchée, c’est trop, et 1000 ça ne sera jamais assez. Respectez-vous d’abord et avant tout.
Et si vous connaissez qqun dans votre entourage qui ne veut pas boire ou qui ne veut pas manger les sucreries sur la table ou du gâteau au dessert, soyez compréhensif et n’insistez pas.
Si vous êtes capable d’être un consommateur modéré, rappelez-vous que la modération a bien meilleur goût. Si vous n’en êtes pas capable, la sérénité et la sobriété sont ce que vous avez de plus précieux. Dans un cas comme dans l’autre, c’est votre santé métabolique physique et mentale qui vous remerciera!